Le nord du Togo, une région que l’on parcourt avec prudence
La partie la plus au nord du Togo ne se prête pas au tourisme (zones orange et rouge sur la carte). La frontière avec le Burkina Faso reste instable et toutes marchandises distribuées depuis le port de Lomé se feront sous escorte militarisée.
La région Kara (une des 5 régions togolaises) offre de nombreuses cultures vivrières entretenues par la communauté des kotokolis, encore appelée Tem, comme leur langage. Elle est aussi reconnue par le tissage, qui donne des pagnes colorés portés entre autres par la communauté musulmane.
Je m’arrêterai donc à Kandé, situé à 55 km de Kara, grosse ville où est né le père de l’actuel président de la République Togolaise.
De Kandé (12 000 habitants), je pourrai sillonner le territoire pour découvrir entre autres les paysages des Habitats temberma.
Les Temberma ou « ceux qui façonnent la terre »
Des habitats traditionnels encore appelés Tata (ou sikien) appartiennent à la tradition autrefois guerrière mais aussi agricole des temps anciens. Des tourelles pour protéger les cultures, des accès rapides pour les différentes pièces à vivre, mais aussi une place pour les trophées s’intriquent dans ces constructions-tours.
Bâtiments regroupés en village, où les cérémonies, rituels et autres initiations sont au cœur d’une société tournée vers le sacré, la nature et l’appel de la forêt. Le baobab centralise bien des manifestations de part sa capacité creuse à protéger nombre de croyances et de rituels.
Le monde des ancêtres, des morts et des esprits joue un rôle omniprésent en interaction avec la réalité du quotidien.
Koutammakou, nom de ce territoire du nord-est du Togo, est classé au Patrimoine mondial de l’UNESCO. La mondialisation, à la vitesse que nous connaissons, ayant des conséquences désastreuses, fragilise et fissure ce mode de vie ancestral.
Continuons la visite du nord du Togo à Tcharé
A 27 km de Kara, se trouve un village où la pratique de la forge est transmise de père en fils.
L’accès dans les ressources naturelles étant devenu interdit, les jantes des camions sont récupérées afin de procurer la matière pour des ustensiles à bêcher “daba” (comme une petite houe), des castagnettes (pour les danses traditionnelles) et les couteaux à dépecer.
Les soufflets, utilisés de façon manuelle, sont issus de peau de chèvre, alors que le maître-forgeron dessinera avant sa signature progressivement la forme finale de l’outil.
La production sera vendue au marché local, en bas du village, où les populations frontalières s’approvisionneront, pour la revente dans leurs pays respectifs.
Ces objets indispensables au quotidien sont fabriqués essentiellement dans cette région.
D’ailleurs la terre, est bien reconnaissable, relevée par ces bêches qui donneront un monticule avec l’humidité nécessaire à la levée de l’igname ou de la patate douce.
50 cm de hauteur, avec un petit chapeau herbeux, pour favoriser la germination et ce sera sur l’étal dans 6 à 12 mois !
Bouilli, cuit à la braise, frit, pilé, ou encore en pâte, l’igname est consommé par la moitié de la population.
Les rendements moyens sont de 10 tonnes par ha, ce qui est un rendement avantageux.
L’utilisation des matières premières
Même si elle diffère par sa matière, argileuse, pierreuse ou sableuse, la terre fait partie du quotidien de cette partie nord du Togo.
Qu’elle soit taillée en brique pour construire les maisons, cimentées pour être finalisées, ou façonnée par les mains expertes d’un aïeul, elle participe de près au savoir-faire usuel de la population.
Également des journées entières sont consacrées à la recherche de branches par les femmes pour alimenter le feu du foyer. Sur la route, des fumerolles indiquent la fabrication du charbon, vendu sur l’ensemble du territoire participant à la diminution des ressources forestières et au déclin de la biodiversité. Selon la FAO, 5,3% soit environ 287 000 ha du Togo sont boisés (31% dans l’hexagone pour comparer).
La pollution est un fléau au Togo, faute de recyclage, d’absence de contrôle routier, d’instrutrie chimique… mais aussi de conscientisation collective. Pourtant différentes actions de sensibilisation sont menées. En exemple, les habitants de Lomé sont exposés à un niveau de pollution de 4 à 5 fois supérieure à la norme de l’OMS.
Le mil, très répandu dans cette partie nord, donnera la boisson sucrée (aoula) ou fermentée après ajout de levure (tchoukoutou).
Cela remplacera le sodabi (eau-de-vie) du sud. Le maïs (ebli ewoe) comme les différentes céréales de la région (sorgho …) regagnera le moulin central du village pour une farine, base de beaucoup de plats (comme le djenkoumé).
Sur la route…
La communauté Peulh accompagne ses troupeaux au delà des frontières de manière ancestrale. Ces habitudes persistent au gré des turbulences climatiques, politiques et même virales…
Les vaches paissent paisiblement quoiqu’il advienne et donneront ce lait pour le waghasi, fromage qui sera frit après être cuit à la vapeur. Les enfants vous le tendront sur le bord du chemin, espérant une vente directe.
Sur la route du retour, la photo familiale est bien connue par les togolais entre les pans d’une faille nommée Aledjo.
A 36 km au nord de la ville Sokodé, la main humaine “comme une épée” a facilité le passage entre région septentrionale et le reste du pays.
Fiche pratique « visite du nord du Togo »
Y aller en voiture : 9 heures de route depuis Lomé (aller), 4 péages (500 CFA par passage), bitume jusqu’à Kandé (nombreux nids de poule en fin de trajet) ; piste sableuse jusqu’à Koutammakou. La vitesse des véhicules n’est pas respectée et de nombreux camions gênent la libre circulation.
De multiples carcasses de voiture jalonnent le chemin … Un chauffeur habitué aux vicissitudes locales me semble indispensable. Surtout que les visites chez le mécano sont régulières.
Conseils : rester au moins une nuit (voire 2) à Kara pour explorer au mieux cette région.
Très beau reportage où l’on sent l’influence géopolitique en toile de fond. La narration appuyée de quelques images très parlantes nous projette encore une fois sur le chemin de la team familyevasion. Merci
Merci Harold, les mots qui reconnaissent le travail de la Team font du bien comme tu peux le penser. Le voyage n’était pas évident car les moyens infrastructurels sont limités. Mais encore beaucoup d’émotions partagées sur le terrain et transmises dans cet article… A bientôt
Coucou ! Super c’est partagé. Belle journée à toi ✨
Merci Anaïs ; à bientôt autour d’un livre !
Oh merci Carole, encore un super article, ça donne envie d’y aller ☺️.
(Ps: ce sont des squelettes de chauve-souris qu’on vois sur la photo après le baobab ? )
Euh non Elodie tous les animaux y passent (même les chiens) sauf le canard et le cochon …
Merci !
Quel beau voyage, dans un autre monde et autre temps ! Ces maisons de terre sont surprenantes, les tissus somptueux de même que poteries et couteaux.
Tu nous emmènes toujours loin !
Eh oui ! Un voyage hors norme grâce à David qui a partagé son expérience.
C’était loin mais qui sait ? je vais peut être atterrir à Compiègne un jour ? 😉