Le peuple N’Zima de Grand Bassam
Grand Bassam est la cité que les Akan N’Zima Kôtôkô fondèrent bien avant la présence des européens.
Le nom de la ville serait tiré de l’expression Bazouam, qui veut dire « Aide–moi à porter ma charge ». Cette population, encore aujourd’hui, reste tournée vers sa vocation première qu’est la pêche.
D’ailleurs les nasses perdurent à travers les siècles et demandent les mêmes gestes répétitifs avant de rejoindre la lagune la plus proche du village.
Sauf si l’appel de la mer est le plus fort… avec les vagues du Golfe de Guinée.
Le peuple N’Zima, dans la lignée traditionnelle, est constitué de 7 familles. Trés protectrices. Si un problème ne peut être résolu au sein de celles-ci, il est exposé au chef de famille, ou en dernier recours, au roi.
Ce dernier est toujours issu de la famille des Alonhomba (qui a pour symbole le raphia et la calebasse).
Le roi est également le 1er Président de la Chambre Nationale des Rois et Chefs Traditionnels de Côte d’Ivoire. C’est une instance importante qui est régulièrement consultée pour les problématiques politiques et économiques, même au sein du gouvernement.
Le peuple des N’Zima, les commerçants étrangers (européens et libanais) et les peuples autochtones comme les Abouré (Akan lagunaires) développèrent un commerce prospère avec les productions d’or, d’ivoire, de sel ou encore de tissus.
Jusqu’en 1930, Grand Bassam restera le poumon économique de la région.
Puis Abidjan sera la troisième capitale de la Côte d’Ivoire en 1933, après Bingerville.
Toujours d’actualités, la communauté N’zima anime la Nouvelle Année (24 octobre/ 7 novembre 2021) lors de la célèbre fête de l’Abissa.
Rendez-vous festif et spectaculaire ! Ce sera peut-être notre prochain voyage, qui sait ?
Hermane, notre guide de la journée, nous en a dit le plus grand bien… Danses de la cour royale, chansonniers, parades… Deux semaines de réjouissances pour cette fête traditionnelle décrite comme une “transmission de valeurs sociales“.
Les stigmates de l’époque coloniale française
Le 1er traité s’est joué dans cette ville côtière en 1842 entre le roi Louis-Philippe, le lieutenant de Kerhallet et le chef traditionnel Attékéblé. Ce lieu deviendra alors un protectorat français.
Endroit stratégique entre l’océan Atlantique, la lagune Ébrié et l’embouchure du fleuve Comoé, cette colonie française verra nombre d’infrastructures s’ériger répondant aux besoins des différents commerces.
Première capitale de la côte d’Ivoire en 1893, aujourd’hui Grand Bassam se retourne sur son passé avec des maisons coloniales massives et délabrées. La Maison Ganamet, ancienne propriété d’un commerçant libano-syrien, en est un exemple parmi tant d’autres. Autrefois nombres de ladies accourraient chez les stylistes du magasin… car c’était le lieu référent de la mode !
Ces bâtiments en ruine confèrent une ambiance toute particulière… Impressionnante dans les ruelles découpées au cordeau du Quartier France. L’ ancien hôtel de France, construit en 1900, sera le 1er hôtel de luxe avec ses 3 suites ! La Nature qui n’aime pas le vide … a repris ses droits.
Alors que la Banque Centrale Africaine (B.C.A.), aurait fait tourner les 1ers billets du pays… d’un format A4, pas très pratique dis – donc !
Aujourd’hui, Grand Bassam affiche un dynamisme tourné vers la technologie avec des start-up locales. Le lycée international Alassane Ouattara accueillant les meilleurs élèves du territoire (dit-on…).
Depuis 2012, le Quartier France est inscrit au Patrimoine Mondial de l’UNESCO. Mais nombreux vestiges restent dans le giron de l’organisation… Intouchables ils tardent pourtant à être réhabilités. Restent encore debouts, les bureaux des Postes et des douanes, avec ses persiennes abaissées et les passerelles recluses.
Des statues évocatrices de l’histoire
La fièvre jaune a eu raison de cette capitale pour la déplacer à quelques kilomètres – de l’autre côté de la lagune – à Bingerville de 1900 à 1934 pour laisser sa place à l’actuelle Abidjan.
Une stèle, inaugurée en 1914, rappelle cette époque dévastatrice où une grande partie de la population disparut. Un corps recouvert d’un linceul, surmonté d’une Marianne est érigée en mémoire de cette crise sanitaire… Par contre je ne sais pas si la Covid aura sa statue !
Un obélisque dédié à Marcel Treich-Laplène, aventurier français, qui donna à la Côte d’Ivoire ses frontières actuelles ; il est considéré comme le fondateur du pays.
Il signa de nombreux traités avec des chefs traditionnels du territoire. Mort à l’âge de 30 ans, il donna son nom à l’actuelle commune de Treichville.
Au carrefour de la place de la Paix…
Des femmes (aux noms de Anne-Marie Raggi, Marie Sery Koré et Odette Ekra) restent en mémoire pour leur combat de rue âprement mené.
Ces femmes ont bravé les autorités françaises. Leurs pas résonnent encore sur le Pont de la Victoire… Elles demandaient la libération de leurs proches internés en prison de façon abusive.
Le 24 décembre 1949, d’Abidjan à Bassam, elles défilent jusqu’à la prison pour réclamer justice. Elles devinrent ainsi des pionnières de la lutte contre le pouvoir colonial du pays. Une fresque en témoigne…
Costumes et traditions au Musée national
Malgré la modernisation de l’ensemble du pays, le poids des croyances reste très fort, relié à des liens ancestraux qu’un étranger ne fait que survoler pendant son séjour.
Aussi le partage précieux des habitants permet d’effleurer cette richesse liée aux legs du passé.
Ces héritages transmis oralement pour la plupart et ces coutumes légendaires tissent des liens sociaux encore bien d’actualités, régissant des choix cruciaux pour la hiérarchie des familles et des villages.
Des fêtes annuelles, avec de nombreux rituels, symbolisent d’ailleurs cet engouement pour le respect des traditions.
Au Musée National des costumes, dans le plus ancien bâtiment du quartier, un guide permettra d’approcher les méandres traditionnels de cette culture ivoirienne.
Construite en 1893, l’ancienne Maison du Gouverneur expose de nombreux éléments, dont des coupures de journaux, des étoffes et maquettes … Je recommande même de commencer par cette visite des plus instructives.
Des artisans et des artistes…
La Maison des artistes, fait partie de ce dynamisme affiché, où un collectif défend haut en couleurs leurs passions du pinceau.
Murs décrépis, ambiance feutrée… recolorés par des tableaux qui accrochent souvent le visiteur.
Longue discussion avec le potier, que l’on retrouve afféré dans la Maison de la Céramique, connue sur tout le territoire.
Passionné, il nous décrit patiemment les différentes étapes des œuvres artisanales.
De l’argile dans l’arrière-pays, aux pots dans le four… bien des gestes sont répétés et ce, depuis des lustres.
Fiche pratique de Grand Bassam
1ère capitale de la colonie de Côte d’Ivoire avec de nombreux sites historiques
Pop : 84 000 hab en 2010
Région : sud-Comoé
Densité : 6 734 hab/km2
Accès en voiture depuis Abidjan (43 km) : la nouvelle autoroute à la sortie de Gonzagueville ou bien la route nationale qui longe l’océan et traverse le marché artisanal de Bassam.
Y séjourner : le choix entre nombreux hôtels sur le littoral
A mon avis,
1) Cocher Grand Bassam dans le road trip de la Côte d’Ivoire est indispensable
2) S’enrichir avec les propos d’un guide que ce soit au musée des costumes mais aussi pour la visite de la ville également
3) Y passer une journée est insuffisante ou cela se fera au pas de course ; par contre lors d’un séjour, on peut profiter de la station balnéaire bien connue, même au-delà des frontières africaines.
4) Fête de l’Abissa : https://www.facebook.com/hashtag/abissa2021
Belle promotion et publicité pour Bassam ; Je te remercie du fond du coeur de faire connaître le peuple N’Zima Kotoko et sa culture dans le monde entier.
Félicitation pour cet article fort intéressant, tu as vraiment assuré.
Bon courage a toi
Très chouette balade tout en couleurs qui rafraichissent les pensées !
Je retiens aussi “ce covid aura t-il droit a une statue” ? chez nous il serait un vrai bwabwa !! Restons plein d’espérance !
C’est sûr ML que le bwabwa incarnera le prochain défilé !
Permis ou pas, le totem carnavalesque sera là !
C’est à toi que nous devons cette découverte Eric. Merci pour ta disponibilité et tes précieuses explications. Je n’oublierai pas cette hospitalité quand nous arrivons chez un hôte et l’acceptation d’une boisson ou d’un mets en signe de respect.
Bon courage à toi aussi…
Je t’en prie Didier c’est avec un réel plaisir que j’ai passé ces moments très enrichissants, vous êtes de belles personnes très sympa, ton épouse Carole et toi.
Prenez soin de vous et bon courage.
A très bientot
Merci de nous faire connaître la côte d’ivoire…
Bon vent à toi…
Merci Aristide, un plaisir que de découvrir ce pays, belle vogue à toi également.