Sirop de batterie, la visite qui régale !
Sirop de batterie, rimèd razié ?
De nombreuses vertus sont attribuées au sirop de batterie. De couleur foncée, avec la saveur si caractéristique de “caramel réglissé”, on lui accorde des indications pour lutter contre l’anémie, la perte des cheveux et les problèmes de peau…
Cela est dû à la richesse nutritionnelle du produit ; en effet, il contient du calcium, des vitamines et du saccharose. Riche en minéraux et oligo-éléments, on y trouve du fer, cuivre et magnésium etc…
Sa consommation est tellement variée que l’abécédaire est utile ! Entre le sucré-salé, il fait la fête de nos papilles depuis le petit déjeuner… au “ti-punch” du midi, au goûter sans oublier la viande rôtie du soir.
Et bien sûr, la boisson rafraîchissante autrement appelée “Madou“.
Moulin Jouan au Lorrain
Commune du Nord de la Martinique, le Lorrain a le dernier moulin artisanal de sirop de batterie. Plus de 250 ans, où les ancêtres coupaient la canne pour les écraser par de gros cylindres datant du 18ème siècle.
Ceux-ci seraient arrivés depuis le Marigot et poussés par la main de l’homme sur les hauteurs de Morne Bois !
Les boeufs alors tournaient le moulin, puis Chabine, la mule (aujourd’hui disparue) et le tracteur ont pris le relais.
Des gestes appris dès l’enfance, auprès de son père, que Daniel Jouan perpétue dans l’art de la Tradition.
La canne à sucre, substrat du sirop
Le premier geste est la coupe de la canne à sucre.
Daniel choisit celle-ci après l’avoir goûtée. Habituellement la teneur en sucre est de 8 à 10 grammes mais peut monter jusqu’à 14 grammes selon l’origine de la canne ; bien sûr la pesée peut renseigner sur ce paramètre « sucré » mais nul ne remplace la saveur dans la bouche !
Tout un processus bien orchestré qui commence donc par le goût. Sucré ? Alors on coupe les 4 tonnes nécessaire à la production.
Pourtant 120 litres seulement seront extraits de ce gros tonnage…
Le père Jouan, plus connu sous le nom de “Ti Jo“, utilisait qu’une seule tonne pour une production essentiellement familiale ; le fils, avec ses amis, multiplient la récolte pour un produit qui se vend “comme du petit pain” surtout pendant les vacances ! Les commandes viennent même de l’hexagone.
Fabrication du sirop de batterie
Des étapes bien précises donnera alors un liquide onctueux et délicieux.
Tout d’abord, les cylindres du moulin pressent la canne ; le jus regagne alors la purgerie, petit bâtiment en contre-bas.
La bagasse (déchet de la canne) servira d’engrais pour le jardin créole à proximité : giraumons et avocats ne demandent pas mieux !
Dans la purgerie, trois chaudières (la grande, la propre, la batterie) condensent peu à peu le liquide en sirop. L’appellation de la dernière chaudière a donné le nom au sirop ; c’est si simple que cela !
Le jus de canne concentré et cuit permet d’obtenir par évaporation le sirop ; cela s’effectue progressivement dans les 3 cuves en fonte dédiées.
L’ébullition est à surveiller et seul l’expert précisera si le feu est à alimenter de nouveau par du bois.
Un thermomètre peut aider mais Daniel par expérience connait tous les rouages pour un sirop parfait.
Comme autrefois, les fleurs d’atoumo, herbes couresses, “pied-de-poule”… sont ajoutées au liquide bouillant.
Après environ 12 heures de cuisson, une gouttière de bambou permet l’écoulement du liquide sirupeux jusqu’à un bassin ; Enfin un tamisage à la main, permet au sirop de batterie d’être débarrassé des derniers déchets de la canne.
Cette dernière sera destinée à l’alimentation des animaux pour les fortifier.
Pendant 24 heures le sirop repose et s’épaissit pour finalement être embouteillé et rejoindre les commerces et/ou les étals des marchés.
Fiche pratique du sirop de batterie
Visite du moulin (fabrication du sirop tous les 15 jours) / réservation au 0696 32 50 51 (Mr Daniel Jouan) / Morne – Bois 97214 Lorrain
Achat sur les foires ou certains marchés (Fort-de-France, Lamentin, Diamant, Le Vauclin, Sainte-Anne, Les Trois-ilets).
Recettes (bonus !)
Madou
- 1 jus d’orange pressée ou quelques jeunes feuilles (froissées ou mixées)
- Le choix des feuilles est multiple : oranger sucré, amer, citron ou pamplemousse, et même fruit à pain ou prune de cythère
- Glace pilée, sucre ou sirop de batterie selon goût et servir bien frais !
- A la préparation (de feuilles uniquement) une cuillère de farine ajoutée, donne le nom de “Blancha“, me précise Ange-Marie
Boisson vitaminée (pichet d’1 litre)
Les principaux ingrédients :
4 oranges et 4 citrons
Feuilles de citronnier (une dizaine) / Feuilles de mandarinier (une dizaine selon les goûts, facultatif) / Feuilles d’oranger (une bonne dizaine voire plus)
Sirop de batterie
Préparation :
Ecraser à l’aide d’un mortier les feuilles d’oranger et de citronnier préalablement lavées ; Presser les 4 oranges et les 4 citrons puis mettre l’ensemble dans le pichet ; Ajouter de la glace pilée et du sirop de batterie à votre convenance.
Crème brûlée (6 à 7 ramequins)
Ingrédients : 8 cl de sirop de batterie, 3 jaunes d’oeufs, 1 gousse de vanille, 50 cl de lait (demi-écrémé pour plus de légèreté ou boisson végétale à l’amande ou aux noisettes), 30 cl de crème fraîche épaisse (ou végétale), 3 càs de sucre de canne complet ou de fleur de coco
Préparation :
Fendre la gousse de vanille en 2 ; ôter les graines noires.
Dans un bol, mettre les jaunes d’oeufs, le sirop de batterie, la crème fraîche (ou végétale), les graines de vanille ; fouetter bien l’ensemble ; Incorporer le lait (ou boisson végétale) et laisser reposer 15 minutes.
Préchauffer le four à 180° (th 6) ; verser la préparation dans les ramequins ; faire cuire au four au bain-marie pendant 45 min ; laisser refroidir puis saupoudrer le dessus des crèmes de sucre de canne ; passer les moules sous le grill du four chaud pendant 3 min ; servir lorsque le dessus est bien caramélisé.
NB 1 : les photos du moulin et tracteur sont un don des “amis du Moulin“
NB 2 : la recette de la crème brûlée a été revisitée par Lyvia Rosil