Sandrine PLANTE-ROUGEOL, sculpteur de « vies volées »

A la rencontre de Sandrine Plante-Rougeol

Sculpture de Sandrine Plante-RougeolPour la 1ère fois, familyevasion a interrogé à distance une artiste, Sandrine Plante-Rougeol.

Des sculptures saisissantes et un partage émouvant à travers quelques réponses données.

La Mémoire se veut être sur le chemin, fondatrice de celui qui se construit…

Arrêt sur images et souffle sur les mots.

Quel a été votre parcours avant la sculpture ?

Née le 31 mars 1974 dans le Centre de la France, je suis Zoréole. Née d’un père réunionnais et d’une mère du Puy de Dôme, deux zones volcaniques (comme moi !).

J’ai commencé la sculpture à l’âge de 8 ans, cela fait donc déjà 37 ans que je modèle et sculpte !

J’ai été autodidacte longtemps. Puis entrepris des études : bac ‘arts plastiques’, faculté ‘histoire de l’art’, apprentissage de sculpture à Rome (élève de Paul Belmondo qui avait fait 8 ans de conservatoire de sculpture à Paris), école de taille de pierre et d’architecture puis enfin des stages en Italie avant de m’installer en Auvergne.

Pourquoi à travers vos œuvres le temps de l’esclavage est central ?

Champ de Sandrine Plante-Rougeol

Je suis descendante d’esclaves ou devrais-je plutôt dire d’humains réduits en esclavage.

J’ai choisi de réaliser un devoir de mémoire pour leur rendre hommage et redonner une dignité à ces femmes, enfants et hommes, volés à l’Afrique, séparés et vendus.

C’est ainsi que toute ma création s’appelle « Vies Volées ».

Je parle d’eux sur leurs terres, dans les captures, les séparations, les ventes, les négriers, les fonds des mers et à la plantation. Créant même une traçabilité de la vie de certains de mes personnages.

Comment sont perçues vos sculptures figuratives rappelant le passé à une époque plutôt futuriste ?

Tout d’abord, rappelons que ce « passé » est bien atrocement un « présent » lorsque l’on sait qu’il y a encore plus de 30 millions d’esclaves recensés dans le monde. Dont la Lybie qui vend encore des humains pendus par les pieds comme des poulets !

Homme barbu de sandrine Plante-RougeolMes sculptures sont très bien accueillies par le public, touché par les expressions.

Notez aussi que je travaille sur l’échelle « un », c’est-à-dire humaine qui crée un lien direct entre ce que l’on regarde et ce que l’on est.

Je travaille avec des lieux de mémoire, lieux publics et musées.

Tous les types d’art peuvent se mêler et je pense que l’art figuratif a encore et heureusement sa place.

Que souhaitez-vous transmettre par vos créations originales ?

Sandrine Plante-Rougeol

Ma création a pour « mission » de sensibiliser les jeunes générations, de raconter sans haine une partie de l’Histoire que nous portons en nous.

Le fait d’avoir des sculptures exposées dans de nombreux lieux, les échanges sur les réseaux sociaux avec des gens de tous les pays qui encouragent ma création et y sont sensible, est très touchant.

Ce serait comme essayer de transformer les chaînes d’entraves en chaînes humaines de solidarité, afin que l’on ne reproduise pas ce fléau. Je donne aussi des cours pour transmettre cette mémoire.

La matière choisie comme support, la terre cuite apporte t’elle une réponse en soi ?

Mais quelle meilleure matière pourrais-je utiliser ?

La terre mère nous porte, la terre nous nourrit, choisit de faire renaître ou mourir toute végétation. C’est de là que nous venons et là que nous finissons…

Elle est fragile et forte à la fois… je travaille notamment essentiellement avec une terre noire, très volcanique, puissante et parfaite pour raconter cette peau sombre et luisante.

Je travaille aussi la résine après moulage de mes sculptures que je réalise en 20 exemplaires, pour des commodités de poids et d’accessibilité financière à l’art.

La douleur, l’horreur ne sont-elles pas à oublier ? Alors pourquoi les incarner ?

Sculpture de Sandrine Plante-RougeolExcellente question… l’horreur pour moi serait de les oublier, de faire comme elles n’avaient jamais existé.

L’horreur est là chaque jour sous nos yeux, alors comment les fermer ?

Les raconter, c’est militer sans pancarte dans la rue, avec comme seule arme ma création …

Les incarner, c’est nous rappeler d’où nous venons.

Et c’est une grande fierté pour moi.

Etant de père réunionnais, pourquoi exposer à la Savane des esclaves à la Martinique ?

Oeuvre achetée par Mr Larose

Mon souhait est de travailler avec tous les lieux de mémoire du monde et ils sont nombreux.

Oeuvre achetée par Mr LaroseJ’ai des pièces à la Réunion, à la Martinique (où je n’expose pas, acquisitions de Gilbert Larose qui est dans le même devoir de mémoire que moi).

En France, il est prévu l’installation d’une grande œuvre dans les jardins de la mairie de Bordeaux début décembre.

Et j’en amène une à Gorée et en Casamance le mois prochain.

Puis il y a un grand projet de 20 sculptures en exposition itinérante sur la côte ouest africaine, les Etats-Unis etc…

Fiche pratique de Sandrine Plante-Rougeol

Sculpteur figuratif dans le Puy de dôme.

Adresse : Atelier à BILLOM, 12 Bis rue de la libération.

Site internet https://www.sculpteur-sandrineplanterougeol.com

 

Remerciements à l’association Mi Lavi, pour le contact de l’artiste Sandrine Plante-Rougeol.